Bruce Douglas BALDWIN, 66 ans
Bruce Douglas Baldwin c’était ce sourire coiffé de belles bacchantes aussi fournies que soignées. Et un regard avenant et intelligent, dont les yeux azur semblaient rire derrière la vitre de ses lunettes cerclées d’acier. Portrait.
Tu as grandi à Harvester avec ta sœur Susan et ton frère Richard. Après tes études à la Ritenour High School, tu es allé au Kirksville College et tu es devenu sergent dans l’armée. Tu as servi ton pays pendant la guerre du Vietnam. Et ensuite, tu es parti à l’aventure, à travers l’Arizona, pour travailler comme guide dans un parc naturel près du Grand Canyon. C’est là que tu as rencontré Virginia, l’amour de ta vie. »
Ces mots (rapportés par La DH), prononcés lors de la cérémonie d’hommage, résument la première partie de l’existence de Bruce Douglas Baldwin. Le nom de la 32e victime des attentats de Bruxelles aura longtemps été tenu secret. Et pour cause ! Ce récent retraité américain de 66 ans était un ancien membre du personnel diplomatique de son pays. Et son épouse, Virginia, dirige l’administration de l’ambassadeur américain auprès de l’Otan à Bruxelles, Douglas Lute. Pour des raisons de sécurité, les informations le concernant ont donc été tenues secrètes dans les premières semaines qui ont suivi le funeste 22 mars 2016.
Quand la bombe a explosé, Bruce patientait devant le comptoir d’enregistrement d’American Airlines. Il s’apprêtait à décoller pour Saint Louis, avant sans doute de rejoindre Virginia chez eux, à Saint Charles, dans l’Illinois. Il n’avait aucune chance d’en réchapper. L’annonce des attentats a aussitôt nourri les craintes de son épouse mais aussi de Susan, sa sœur, et de Robin, sa nièce. Le pire s’est hélas confirmé.
De Bruce, on sait donc peu. Si ce n’est ce sourire coiffé de belles bacchantes aussi fournies que soignées. Et un regard avenant et intelligent, dont les yeux azur semblaient rire derrière la vitre de ses lunettes cerclées d’acier. « Sa photo traduit bien sa personnalité, confirment des amis cités par nos confrères. C’est ainsi qu’était Bruce et c’est ainsi que nous nous rappellerons de lui. »
A l’aise à Bruxelles comme en Arizona
Le couple s’était rencontré dans un grand parc américain, en Arizona. Virginia était plus jeune que lui de huit ans. Ils avaient mené une bonne partie de leur carrière ensemble. Un chemin qui les avait notamment menés en Jordanie puis à Abou Dabi, en 2008, au sein de l’ambassade américaine. En 2015, Bruce avait achevé sa carrière au département d’Etat, tandis que son épouse posait ses valises à Bruxelles pour prendre ses fonctions actuelles.
Ce nouvel exil loin des rives du Missouri, Bruce l’avait mis à profit pour découvrir la capitale de l’Europe. L’occasion pour lui de se muer en chercheur d’or… houblonné. Car de sa jeunesse américaine, Bruce avait conservé une âme prolixe de sherpa, un goût pour les déambulations instructives. Disert, il pouvait tenir seul une conversation pour des compagnons aussi ravis qu’admiratifs. « Encore récemment, il servait de guide à ses amis mais plutôt à Bruxelles, à travers ces innombrables estaminets, avec toutes ces bières réputées », confient des amis cités par nos confrères.
Bruce Douglas Baldwin a été incinéré à Bruxelles. Ses cendres sont ensuite reparties vers les Etats-Unis pour une cérémonie d’hommage en présence de représentants du gouvernement. Le Missouri charrie les pleurs de ses proches et les jette désormais dans le Mississippi voisin, fort de l’apport de son longiligne affluent. Mais qui, mieux que Bruce, aurait pu en parler ?
Article Le Soir, mai 2016 par Pascal Lorent.