DENG JINGQUAN, 24ans
Deng Jingquan comptait parmi ces jeunes Chinois qui peuvent désormais voyager et entendent bien mettre cette liberté nouvelle à profit pour découvrir le monde. Sur les photos, il apparaît souvent les cheveux en bataille, au-dessus de lunettes à monture noire. Il mesurait 1 m 73, pour une soixantaine de kilos. Il lui manquait un mois pour fêter son 25e anniversaire lorsqu’il a été fauché par les premiers attentats du 22 mars, à l’aéroport de Zaventem.
« Frank » Deng, comme il se présentait à ses interlocuteurs étrangers, était un homme d’affaires précoce. Après des études de commerce international réalisées dans l’est de la Chine, il s’était fait embaucher par une société de matériel médical, Comen, installée à Shenzhen, ville tentaculaire emblématique de l’ouverture de la Chine. Rapidement, il avait été envoyé en Indonésie. Il a passé deux ans à travailler sur ce marché en pleine expansion où il a aidé son employeur, toujours Comen, à doubler ses ventes.
De retour à Shenzhen, Deng Jingquan s’est lancé à son propre compte, créant au mois d’août 2014 une start-up baptisée Guoguoxianchi – littéralement « fruit fruit manger frais » – qui devait lui permettre de miser sur l’appétit nouveau de la classe moyenne chinoise pour une alimentation de qualité.
Sur Weibo, le Twitter chinois, d’anciens collègues ont décrit M. Deng comme un jeune homme ingénieux, dont le visage devenait rouge après un verre d’alcool. Ce mardi 22 mars, il avait dormi dans la capitale belge avant de se rendre à l’aéroport de Zaventem pour embarquer sur le vol JP377 d’Adria Airways, qui devait décoller à 10h05 à destination de Ljubljana, où il avait des rendez-vous d’affaires. « Une personne qui l’a soutenu pour l’extirper, blessé, de l’aéroport m’a décrit une scène de guerre » , raconte Heidi Simons, qui a aidé la famille de Deng Jingquan à le localiser après avoir été contactée sur Internet par un de ses amis.
Après les explosions, le jeune Chinois a été rapidement emmené à l’extérieur du bâtiment par des inconnus, puis conduit à l’hôpital. C’est là qu’il a succombé à ses blessures quelques heures plus tard, avant que ses proches aient le temps d’arriver sur le sol belge. Contactée, la famille de Deng Jingquan en Chine n’a pas souhaité témoigner pour ce portrait.
Harold Thibault (Le Monde)